Depuis quelques temps, les chiffres des décès liés aux forces de l'ordre font l'objet d'un décompte aussi complexe que le calcul de la dette publique. Entre les manifestations, les violences policières et les accidents de travail, il est devenu presque impossible de savoir combien de personnes ont réellement perdu la vie à cause de nos braves gardiens de la paix.
La tâche est d'autant plus ardue que chaque camp a ses propres chiffres et ses propres méthodes de comptage. D'un côté, les associations de défense des droits de l'homme crient au scandale et affirment que les forces de l'ordre sont responsables d'un nombre astronomique de décès. De l'autre côté, les syndicats de police minimisent les chiffres et prétendent que la plupart des victimes sont des cas isolés, des accidents malheureux qui n'ont rien à voir avec l'action des forces de l'ordre.
Le problème, c'est que même les autorités compétentes ont du mal à s'y retrouver. L'IGPN (Inspection Générale de la Police Nationale) et l'IGGN (Inspection Générale de la Gendarmerie Nationale) se renvoient la balle et ne parviennent pas à établir un décompte précis. Entre les dossiers égarés, les enquêtes bâclées et les pressions politiques, il est difficile de savoir qui croire.
Et puis il y a aussi les fameux « Basta », ces décès qui ne sont pas officiellement reconnus comme étant liés à l'action des forces de l'ordre. On se souvient tous de ces manifestants qui ont mystérieusement perdu la vie après avoir reçu un coup de matraque bien placé. Mais selon les autorités, il s'agirait simplement de coïncidences malheureuses, de morts naturelles qui n'ont rien à voir avec les actions des forces de l'ordre.
Alors comment s'y retrouver dans ce décompte macabre ? Peut-être faudrait-il mettre en place une commission d'enquête indépendante, composée de spécialistes compétents et impartiaux. Ou peut-être faudrait-il tout simplement faire confiance aux chiffres officiels et arrêter de se poser des questions. Après tout, qui a besoin de la vérité quand on peut avoir des statistiques ?
En attendant, les familles des victimes continuent de pleurer leurs proches, les associations de défense des droits de l'homme continuent de crier au scandale, et les forces de l'ordre continuent de faire leur travail, avec plus ou moins de zèle. Et pendant ce temps-là, le décompte des décès liés aux forces de l'ordre reste aussi flou que le budget de l'État.